« Bonjour ! » Les lèvres d’Amaryllis s’étirèrent en un large sourire. C’était la seule voix qui était capable de la rendre heureuse, d’illuminer sa journée malgré tout ce qui avait pu se passer. Jimmy. Elle ne l’avait pas encore vu aujourd’hui, alors elle déposa un baiser sur sa bouche et le serra dans ses bras. Tout était devenu si naturel maintenant qu’ils étaient ensemble. C’était rassurant, c’était simple, c’était eux. Finalement, c’était tellement évident qu’Amaryllis ne savait pas pourquoi ce n’était pas comme ça depuis plus longtemps. « Bonjour Jim ! » Sa voix s’était calquée sur la sienne, douce, chaude, joyeuse.

Les deux premières années avec qui elle discutait Quidditch quelques instants plus tôt s’éloignèrent en pouffant. « C’est plaisant de voir qu’ils arrivent à sourire encore. » La Poufsouffle acquiesça et jeta un regard presque attendri aux deux élèves. « Oui, ils arrivent à garder une part de leur innocence… Enfin, on n’est pas les plus à plaindre… » Évidemment, la jeune fille faisait référence aux Nuncaboucs. Rares étaient les sourires sur leurs visages, peu importe leur innocence ou leur maturité. A chaque fois qu’elle croisait leur regard, elle ne pouvait s’empêcher de se sentir coupable. Elle aurait aimé les aider, mais comment faire ? Les Carrow étaient tout le temps dans les parages, et elle avait déjà vu des élèves se faire sévèrement réprimander rien que pour un sourire ou un geste amical… Depuis un mois, elle ne s’habituait toujours pas au nouveau fonctionnement de l’école.  « Enfin, c’est fou, on avait leur âge quand on s’est rencontrés ! Ca me semble si proche, et en même temps tout a changé depuis… » Nostalgie ? Sûrement, oui. « Je t’ai préparé quelque chose ! Partante ? » Ah, c’était pour ça l’excitation qui émanait de son petit ami ? « Oh ! Bien sûr que je suis partante ! On va où ? » La Poufsouffle prit la main que lui tendait Jimmy, et se laissa entraîner à travers les couloirs du château. Pas trop vite, pour ne pas attirer l’attention, mais suffisamment pour laisser trahir légèrement leur excitation. Jimmy de lui dévoiler sa surprise, et elle de découvrir cette surprise. Malgré un escalier peu coopérant, les deux Sixièmes Années arrivèrent finalement à destination. Amaryllis reconnu le couloir de la Salle Sur Demande. Évidemment, c’était l’endroit parfait pour préparer quelque chose à l’abri des regards et de tout risque de type Mangemort tyrannique de l’école. Le brun lui demanda de fermer les yeux, ce qu’elle fit sans hésiter. Bien sûr, elle avait toute confiance en lui. Quelques dizaines de secondes plus tard, les portes s’ouvrirent et Amaryllis sentit une douce brise sur son visage, et une délicate odeur fort agréable.  « Encore quelques pas.. Vas-y.. On y est presque.. » La jeune fille se laissa guider à l’intérieur. Ce n’était décidément plus une salle du tout, ça avait l’air si grand !

« SURPRISE ! »

Amaryllis ouvrit les yeux. Elle eût quelques instants l’impression qu’en fait, Jimmy avait transplané avec elle dans le parc de Poudlard, mais plusieurs indices lui indiquaient que ce n’était pas possible. Déjà, le ciel était bleu, d’un bleu que l’on voit rarement en Ecosse. Ensuite, le parc était entièrement vide, ce qui était fort étonnant puisque dès qu’un rayon de soleil pointait le bout de son nez, tous les élèves se retrouvaient dans l’herbe. Et pour finir, il n’y avait pas les horribles détraqueurs qui erraient parfois autour du château.

« C’est… Waw, c’est merveilleux, Jim ! Mais comment tu as fait ça ?! »

Tout semblait si… Réel ! Que ce soit les papillons qui volaient de fleurs en fleurs, la chaleur du soleil, la légère brise qui effleurait les feuilles des arbres… C’était parfait. Une vraie pause, une parenthèse dorée, avec tout ce qui se passait à Poudlard et dans le monde magique en ce moment… Amaryllis remarqua alors la belle nappe à carreau vichy qui était entendue à quelques mètres d’eux. Tarte aux pommes, scones, muffins… Plein de petites douceurs étaient installées sur le morceau de tissu. « C’est parfait. Tu es parfait, tellement ! » Amaryllis ne put s’empêcher de se jeter dans les bras de son amoureux. Elle était tellement contente, tellement chanceuse de l’avoir lui. « Merci, merci, merci ! C’est donc pour ça que je ne t’ai pas vu de la matinée ? »

Les deux jeunes élèves se dirigèrent vers la nappe et s’y installèrent. Le temps était tellement agréable qu’Amaryllis se décida à enlever sa chaude robe de sorcier, afin d’être plus à l’aise avec son chemisier blanc et la traditionnelle jupe grise des filles de l’école. « C’est agréable d’être un peu à l’écart de… De tout ça ! » Amaryllis balayait du regard l’ensemble du par. C’était absolument fou que ce paysage à perte de vue soit dans la salle sur demande. Bon, il s’agissait sûrement d’une illusion d’optique fort bien réalisée, mais que c’était agréable ! Elle pouvait même voir les drapeaux du stade de Quidditch flotter, à plus de cinq cents mètres d’eux. « Tiens au fait, que dirais-tu d’organiser un entraînement de Quidditch commun entre nos deux équipes ? Même si on est censés être adversaires, et encore plus avec la finale de l’année dernière, mais avec le climat actuel je pense que ça peut être bien de resserrer les liens entre les élèves. T’en penses quoi ? » Amaryllis glissa un petit scone à la cannelle dans sa bouche. Que c’était bon, d’être là !

Une douce chaleur se répandait dans sa paume, sa main dans celle de Jimmy. Elle était heureuse à chaque fois qu’elle le regardait. Mais il y avait toujours cet autre sentiment. Peur ? Gêne ? Culpabilité ? C’était comme si elle avait l’impression de ne pas mériter ce qu’il lui arrivait. Pas avec tout ce qu’il se passait en ce moment, dans le château et dans tout le Royaume-Uni. Enlèvement, torture, peur… Morts. Tout cela était si réel, si proche. Mais quand elle était avec Jimmy, ces soucis s’éloignaient pour un temps. Et puis voilà qu’il lui prouvait encore qu’il était le jeune homme parfait pour elle. Elle était émerveillée par tout ce qu’il avait préparé pour elle, et elle ne savait plus où poser son regard. Ses yeux se dirigèrent alors vers Jimmy, et elle trouva ce qu’elle cherchait dans les yeux. L’amour.

« C’est ça ! Enfin, Pol m’a aidé à vider les cuisines. On a eu chaud aux fesses ! Il pense que je passe trop de temps avec toi, il n’est pas très partageur. Mais, il te passe le bonjour ! » Amaryllis laissa éclater son rire cristallin. C’était rare de pouvoir exprimer ses émotions comme ça, tant ils étaient surveillés dans le château. Ça faisait du bien. « Vous avez pris tous ces risques… Pour moi ? » Elle savait bien que beaucoup de personnes avaient déjà volé dans les cuisines, mais cette infraction n’était plus aussi anodine qu’avant. « En tout cas, tu m’excuseras auprès de Pol. Il faudrait lui trouver une petite amie aussi, tu ne crois pas ? » L’idée était plutôt amusante, mais pas sûre que le Gryffondor en question accepte l’idée d’un rendez-vous arrangé…

Jimmy lui conseilla ensuite de goûter à la tarte aux pommes, ce qu’elle fit en mordant dedans avec plaisir. Elle était délicieuse, c’était bien vrai. Pourtant, c’était la même tarte que les elfes leur servaient à chaque repas. Même recette, mêmes ingrédients, mêmes cuisiniers. Et pourtant, le goût était plus doux, la texture plus moelleuse, la pâte plus dorée… Comme quoi, les circonstances pouvaient tout changer. « C’est vrai qu’elle est succulente ! » commenta-t-elle, avant d’enchaîner sur l’un de leurs sujets favoris, le Quidditch. « Je pense que je pourrais les convaincre de s’entraîner avec vous ! En France, on dit souvent L’union fait la force, je crois que c’est Unity is strength. On n’est pas assez pour s’entraîner correctement, de toute façon. Et puis, tu sais, les Poufsouffles ne sont pas rancuniers en règle générale. Sauf Ali, mais bon, elle n’est plus là de toute façon. Comme presque tous les membres de l’équipe de l’année dernière d’ailleurs… » Les visages de ses anciens coéquipiers défilèrent dans sa tête. Elle revoyait Elise et sa batte, Dean et Nathan, Olivia et son tableau où s’inscrivait des tactiques de plus en plus compliquées. Et puis Charlotte, aussi. Ses yeux se fermèrent quelques secondes. Elle prit une grande inspiration. « Je demanderai aussi au Professeur Chourave ! J’espère vraiment qu’on pourrait mener à bien ce projet. C’est vrai que ça renverrait un beau message aux autres... Et puis ça nous changera un peu les idées ! »  Son amoureux évoqua ensuite un entraînement qu’il aurait eu avec Nolan quelques temps auparavant. « Oh, tu t’es entraîné avec Nolan ? Trop cool ! Ca s’est bien passé ? Et tu l’as trouvé comment sur le terrain ? Parce que tu sais, il n’y avait tellement personne aux sélections que j’ai du prendre tous ceux qui se sont présentés dans l’équipe… Je fais confiance à Nolan, bien sûr, mais je ne l’ai jamais vraiment vu jouer ! Enfin c’est génial, nos deux maisons se rapprochent déjà sur le terrain ! J’ai tellement de mal à m’imaginer qu’un jour on sera adversaire devant toute l’école !! Ça va être tellement bizarre, tu ne penses pas ? »

Après avoir fini leur discussion sur le Quidditch, un léger silence s’installa entre les deux sixièmes années. Jimmy en profita pour croquer dans sa tarte, et Ama ferma les yeux et se laissa bercer par les doux bruits qu’elle entendait. Les oiseaux dans le ciel, le vent sur les feuilles de l’arbre, le clapotis des vaguelettes du lac… C’était un beau moment. « Sinon, comment tu vas, toi ? » La petite Poufsouffle rouvrit les yeux. Elle se tourna vers Jimmy et lui adressa un sourire, qui s’effaça légèrement quand elle vit l’air sérieux de son petit ami. Ce n’était pas un simple ça va ? posé innocemment tous les jours. Elle ouvrit la bouche, sur le point de répondre oui, mais…

Mais il y avait les Carrow.
Il y avait les Nuncaboucs.
Il y avait l’attaque de Poudlard, il y avait ses cicatrices.
Il y avait son frère, il y avait toute sa famille.
Il y avait May, Adam, Dean, Nathan et même Ali.
Il y avait Catherine, et il y avait surtout Charlotte.

Elle faisait tout pour ne pas y penser. Et tout, c’était surtout voir Jimmy et s’enfermer à la bibliothèque ou dans la salle commune pour étudier ou élaborer de nouvelles stratégies d’entraînement. Ses notes s’étaient d’ailleurs plutôt améliorées, comble de l’ironie pour elle qui luttait toujours pour obtenir un Acceptable dans la plupart des matières. « J’essaie de ne pas réfléchir à… Tout ça. C’est trop dur, si j’y pense j’ai l’impression que tout s’écroule autour de moi. Alors je pense à toi, ou je cherche Carlie, et en général ça va mieux. » Le jour, tout était plus simple. Il y avait toujours un moyen de détourner son attention, d’occuper ses mains et son esprit, de passer du temps avec ses amis. Mais la nuit… Tout était différent. May n’était plus là, sa famille n’était plus là, plus personne n’était là pour la protéger et la rassurer. Elle en demandait déjà tellement à Carlie toute la journée qu’elle ne pouvait pas la déranger la nuit aussi. « Par contre... J’ai encore beaucoup de mal à dormir la nuit. Encore plus qu’avant, avant tout ça. Je fais cauchemar sur cauchemar toutes les nuits. » Elle parvenait à cacher ses cernes noirs qu’elle avait tous les matins en se levant grâce à son don. Et puis elle n’en parlait pas, à part ses camarades de dortoir qui étaient parfois réveillées par son sommeil plus qu’agité. Mais c’était Jimmy, elle pouvait tout lui dire. Et puis, qui sait, peut-être que ça irait mieux en lui confiant ses angoisses. Elle savait qu’en dépit de tout, elle pouvait lui faire confiance. « Et toi, love, comment tu vas ? » Amaryllis espérait que, de son côté aussi, Jimmy savait qu’il pouvait lui faire confiance.

« Unity is strength » Jimmy répétait les mots qu’Amaryllis avait prononcé quelques instants plus tôt. Dans leur conversation actuelle, cela s’appliquait au Quidditch, mais en réalité c’était bien plus que cela. La petite jaune sentait bien que toute cette année serait tournée autour de ces trois mots. L’union fait la force, ils l’avaient déjà prouvé avec l’Armée de Dumbledore un peu moins de deux ans plus tôt. Elle en était sûre, l’AD allait renaître cette année. Sous quelle forme, avec quelles personnes, dans quelles conditions, elle ne le savait pas encore. Elle aurait aimé en discuter avec Meredith, mais la jeune préfète était probablement tellement surveillée qu’il ne valait mieux pas interférer. Ama savait que son amie lionne avait ses propres projets, ses propres batailles à mener. Mais dans tous les cas, elle lui faisait une confiance aveugle malgré l’image qu’elle renvoyait aux autres élèves. La petite blonde ne supportait pas les critiques et autres remarques désobligeantes qu’elle entendait sur son amie, mais elle ne pouvait pas réagir sans faire tomber sa couverture. Alors elle préférait se taire, et attendre le moment où Meredith révèlerait son double-jeu.

Amaryllis et Jimmy discutèrent ensuite des modalités d’organisation de leur entraînement commun Poufsouffle – Gryffondor, puis des progrès de Nolan avant d’en venir au sujet du match qui allait bientôt confronter leurs deux équipes. « Ca va clairement être étrange, c’est certain.. Mais, tu sais, je préfère tout de même que l’on joue l’un contre l’autre plutôt que de te voir affronter les Serpentards. Ce sont des brutes. » La blondinette ne put s’empêcher de retenir un petit rire. Elle voyait bien que Jimmy s’inquiétait pour elle… Mais s’il y avait bien un endroit où elle n’avait pas peur, c’était sur le terrain de Quidditch. Elle se sentait si libre sur un balai ! Et puis elle avait toujours pu compter sur ses coéquipiers. Dean et Elise étaient des batteurs très efficaces l’année dernière, et elle leur faisait une confiance aveugle. Cette année, il s’agissait de nouveaux batteurs mais Ama ne doutait pas d’eux ni de leurs capacités, comme tout le reste de l’équipe. « Oh tu sais, les Serpentards ne me font pas peur ! Après tout, c’est contre vous qu’on a perdu l’année dernière ! Les jaunes vont être remontés, c’est plutôt moi qui devrait m’inquiéter pour vous. » Il y avait plusieurs de ses amis dans l’équipe menée par Jimmy. Kenneth et Gabriel, mais aussi Meredith, et c’était bien là le plus surprenant. « Je demanderai à l’équipe de ne pas être trop violente, quand même. Bon, on n’a plus Ali, je pense que ça aurait été elle la plus dure à gérer… » La rousse aurait sûrement été folle de voir Amaryllis en tant que capitaine. Mais la petite jaune aurait préféré avoir sa camarade de dortoir avec elle. Sa chevelure rousse lui manquait, malgré son sale caractère. « Faut qu’on essaie de motiver nos équipes à jouer un beau Quidditch plutôt qu’un combat pour la victoire, tu ne penses pas ? On évitera peut-être des blessés comme ça. » Amaryllis avouait elle aussi à demi-mot qu’elle s’inquiétait pour Jimmy.

La discussion avait pris un tournant plus sérieux. Amaryllis venait de se confier à son lion. « Tu sais très bien que je suis toujours là si tu as besoin, toujours. Il ne faut pas que tu hésites, tu comprends ? Je.. Je ne sais pas quoi faire pour tes cauchemars sauf te promettre une chose : c’est que ça va s’arranger. J’en suis sûr, au fond de moi, je le sais. Tout ira mieux. Peut-être pas tout de suite, tout de suite, mais tu verras, un jour le ciel redeviendra bleu et tout ira mieux. » Sa voix était si rassurante, ses mains si douces, son contact si chaud… Amaryllis aurait voulu rester là toute sa vie. Elle était si bien avec lui. Elle ne ressentait plus ce poids si pesant sur son cœur, elle se sentait légère et presque optimiste. Oui, quand elle était avec Jimmy, elle n’arrivait pas à voir autre chose qu’un avenir heureux, brillant, paisible. « Merci. Merci d’être toi, merci d’être là… Merci pour tout. Je ne sais pas comment je ferai sans toi. » En ce moment même, Jimmy était presque tout pour elle. Son essentiel. « Et moi, compte tenu des circonstances, ça va. Je ne sais pas trop ce que je pourrais faire pour améliorer la situation générale, mais ça va, ne t’en fait pas pour moi. » Amaryllis resserra sa main autour de celle de son amoureux. « Je crois qu’on ne peut rien faire… Pour l’instant. Mais on pourra faire quelque chose, à un moment, j’en suis sûre. Et comme tu le dis, pour l’instant je pense qu’on devrait profiter de l’instant présent. »

« Tu te souviens qu’on se trouve dans la salle sur demande, n’est-ce pas ? On ne peut pas changer l’apparence même de la salle lorsqu’on s’y trouve, mais, on peut y faire quelques améliorations. Ferme tes yeux et écoute ma voix. » La petite blonde obéit à son petit ami. Comme il le lui disait, elle imagina un manège. Un souvenir lui revenait particulièrement en tête. Ce n’était pas le plus grand des manèges, le plus sophistiqué, le plus rapide. Mais c’était le plus beau à ses yeux, celui où ils avaient l’habitude d’aller l’été avec sa famille. Il était au bord du Lac Léman, avec ses vieux chevaux, dont la peinture s’écaillait faute d’entretien régulier. Elle se rappelait de son cheval préféré, celui sur lequel son père l’avait aidé à grimper, puis ses frères, puis sur lequel elle était montée toute seule, puis sur lequel elle avait installé sa petite sœur. Et la musique, comment l’oublier ? Cela faisait des années qu’elle n’y avait pas pensé, et pourtant en un instant tout était revenu. Elle eut l’impression de l’entendre à nouveau, et de sentir l’air frais du lac sur ses joues. Elle allait rouvrir les yeux quand Jimmy évoqua le pompon. Oui, ce petit tas de tissus tout doux, mais si difficile à attraper !

« Et voilà ! ♥ » Amaryllis finit par ouvrir les yeux et découvrit la réplique exacte du manège de son enfance. Tout semblait être là, et la présence du lac de Poudlard juste à côté rendait l’illusion presque parfaite. La petite jaune avait l’impression d’avoir six ans. « Regarde, Jimmy ! Oh, comme c’est beau ! Tu entends, il y a même la petite musique ! On va faire un tour ? Aller, viens ! » Amaryllis lui attrapa la main et ils s’élancèrent en courant vers le vieux manège. Oubliés les Carrow, oubliés les morts, oubliés les Nuncaboucs, oubliée la guerre. Jimmy était vraiment un magicien du cœur. Les deux grimpèrent sur le manège en marche. La blondinette pouvait presque entendre la voix du vieux gérant qui leur interdisait de monter sur le manège en marche. On s’en fiche, on fait ce qu’on veut ! Amaryllis repéra tout de suite son cheval préféré. D’un blanc immaculé, si on omettait les écailles de peintures qui étaient parties ça et là. Une corne dorée sur son front la différenciait de tous les autres chevaux du manège. Le manège s’arrêta le temps que les deux élèves s’y installent. « Là, c’était mon cheval – ma licorne, pardon. Azalée voulait tout le temps monter dessus, elle voulait toujours tout faire comme moi ! Est-ce que… » Amaryllis passa sa main sur la corne dorée, à la recherche d’une aspérité. « Oui ! Regarde ! A + A, gravé juste-là. C’était mon frère Jasmin qui avait gravé nos initiales ici pour qu’on arrête de se disputer. Alors du coup on montait toutes les deux, même si c’était inconfortable. »  Sans s’en rendre compte, c’était probablement la première fois qu’Amaryllis évoquait sa petite sœur devant Jimmy. Mais elle n’y pensait pas, trop occupée à observer chaque détail du manège.

« Allez, grimpe ! » Amaryllis indiqua à Jimmy le grand cheval brun situé juste à côté de la licorne sur laquelle elle s’était déjà installée. A peine Jimmy était-il installé que le manège se remit en marche. La petite jaune attrapa la main de son amoureux et ne put s’empêcher de rire. Ils avaient l’air d’un prince et d’une princesse. Elle ferma les yeux un instant, et les imagina en tenue moyenâgeuse. Quand elle les rouvrit, Jimmy était vêtu d’une magnifique cape en velours rouge et d’une cuirasse dorée avec un lion frappé sur le torse. Elle même portait une robe jaune clair, avec un délicat laçage noir. Tous les deux avaient une couronne finement ouvragée sur la tête. De manière totalement objective, Amaryllis trouvait qu’ils étaient vraiment beaux. Elle se tourna vers Jimmy et plongea ses yeux dans les siens. « Je t’aime. » En ce moment-même, elle était tout simplement heureuse. Elle n’aurait pu rêver meilleure personne à ses côtés. « Attention ! » Elle voulu prévenir Jimmy, mais c’était déjà trop tard. Il venait de se prendre le pompon en pleine tête, et les fils de tissus ne semblaient pas vouloir laisser sa tête tranquille. La petite fleur ne put s’empêcher de rire. Elle était vraiment bien, ici.

« Tournicoti, tournicoton ! » Une petite musique entêtante revenait à l’esprit d’Amaryllis. Elle se revoyait des années en arrière, à regarder Le Manège enchanté avec sa famille sur leur téléviseur, comme de nombreux petits moldus. Il n’y avait qu’Azalée qui n’aimait pas regarder l’émission, étant donné que la vache portait le même prénom qu’elle. Chaque fois que le personnage apparaissait à l’écran, la petite blonde s’emparait de la télécommande et appuyait sur tous les boutons afin de changer de chaîne. S’en suivait une bataille entre tous les enfants pour récupérer la télécommande et changer de chaîne. Leur mère finissait par agiter sa baguette et l’objet convoité atterrissait dans sa main. Azalée se mettait à pleurer, et son père finissait par l’emmener dans sa chambre pour lui lire une histoire pendant que le reste de la famille regardait la fin du Manège enchanté. A cette époque, pas de guerre, pas de morts, juste un bonheur simple. Et là, sur ce manège, Amaryllis avait l’impression de retrouver cette innocence et cette joie passée. C’était si agréable, une vraie bulle d’oxygène dans l’atmosphère si sombre du château !

A peine sa déclaration faite à Jimmy, le couple se fit attaquer par un pompon en forme de renard, traînant derrière lui une queue formée par de nombreux fils de laine. « Je crois qu’on a gagné le pompon !! Je t’aime aussi, Love ! » Jimmy lui avait murmuré ces derniers mots au creux de son oreille, ce qui lui déclencha un frisson qui descendit délicieusement le long de son dos. « Je ne comprend pas comment nous avons put passer à côté de toute cela pendant toutes ces années. » Amaryllis ne put s’empêcher de rire. Elle s’était souvent posé cette question depuis qu’elle sortait avec le Lion. Ils s’étaient pourtant rencontrés très tôt, lors de leur premier trajet en train dans le Poudlard express. Et ils ne s’étaient plus jamais vraiment quittés. Jimmy était son meilleur ami, et jusqu’à récemment elle n’avait jamais pensé à lui autrement. « On était peut-être trop jeunes ? Ou peut-être trop occupés à chercher ailleurs ce qui se trouvait devant nos yeux ? » Le Gryffondor lui avait à maintes reprises parlé de ses relations amoureuses, et jamais elle n’avait senti la moindre once de jalousie. A l’inverse, il fallait avouer aussi que la petite fleur était à des lieues de s’intéresser aux garçons jusqu’à la fin de l’année dernière. Et lors de la bataille de Juin, le feu n’avait pas seulement brûlé sa peau mais aussi tout le futile et le superficiel qu’elle avait autour d’elle, afin de ne garder que l’essentiel. Son corps et son cœur avaient été mis à nus et elle s’était rendue compte que le visage et le nom de Jimmy revenaient souvent dans ses pensées. Trop souvent. Elle avait eu peur. Peur d’affronter ses sentiments, mais surtout peur de s’attacher encore plus à lui et de le voir souffrir. Mais elle était revenue, et malgré toutes les épreuves qu’ils avaient à affronter cette année, elle savait qu’elle avait pris la bonne décision. Jimmy était parfait.

« Alors, cette surprise te plaît ? » Amaryllis le regarda avec des yeux pétillants de bonheur « Bien sûr que ça me plaît, tu es fabuleux ! C’est tellement… » Mais elle ne trouvait pas de mot pour décrire ce qu’elle ressentait, alors elle se contenta de passer sa main dans la nuque de son petit ami et d’approcher sa tête de la sienne afin de poser un baiser passionné sur ses lèvres. Dans le mouvement, sa couronne de reine chuta et rebondit jusque dans l’herbe. « Tu dois te rendre compte que tu as le meilleur petit ami du monde, n’est-ce pas ! » La petite fleur fit mine de réfléchir quelques instants. « Mmhhhhh… Faut dire aussi que j’ai pas d’autre point de comparaison… » Voyant l’incrédulité dans le regard de Jimmy, elle ne put s’empêcher d’éclater de rire. « Mais non voyons, pas besoin de ça, je sais que tu es le meilleur pour moi ! »

Jimmy se leva ensuite sur sa monture et se lança dans une déclaration, avant d’être précipité à terre. Le manège s’était arrêté, probablement pour leur signifier qu’ils avaient épuisé leur temps disponible dans la Salle sur Demande. Jimmy se mit à rire, rapidement rejoint par la petite Poufsouffle. Elle descendit gracieusement de son destrier et tendit sa main vers son amoureux pour l’aider à se redresser. « Que je t’aime. ♫ » Une douce chaleur se répandit dans son ventre et s’intensifia lorsque le lion posa ses lèvres sur les siennes. Elle lui rendit son baiser avec fougue, ne pensant à rien d’autre qu’à son amour pour lui qui continuait de grandir à chaque instant passé ensemble.

Elle ne voulait pas que ce moment s’interrompe. Et pourtant, Jimmy finit par se reculer doucement et soupira qu’ils devraient certainement rentrer. Amaryllis se joignit à son soupir. « Oui… Au moins, chaque fois que ça n’ira pas dans le château, on pourra repenser à cet endroit. Notre endroit. Je crois que le seul fait de savoir qu’il existe et qu’il est tout proche de nous m’aidera à mieux supporter le quotidien. » Elle se pencha pour ramasser sa couronne, et celle du lion qui était tombée en même temps que lui. « J’aurai bien aimé ramener nos couronnes, en tant que souvenir. » Elle marque une courte pause, avant d’enchaîner. « Mais bon de toute façon, ces moments-là resteront gravés ici. » Elle montra du doigt sa tête. « Et surtout là ! » Sa main se posa sur le torse de Jimmy, juste au-dessus de son cœur.