Et c'était peu dire. Depuis moins d'une semaine qu'elle était à Poudlard, Ruth avait eu tellement à voir, à apprendre, à comprendre qu'elle en avait mal à la tête. Elle n'avait réussi qu'à se couvrir de ridicule a chaque fois qu'elle devait parler, n'avait pas répondu à une seule question, se mettait à rougir dès qu'elle voyait un garçon (et y en avait plein !), oubliait sa baguette une fois sur quatre et ne comprenait rien à ce qui l'entourait. En plus la robe noire se prenait dans ses pieds, les plumes faisaient des tâches (les bics étaient plus simples !), et si la nourriture était bonne, elle ne comprenait pas comment elle était servie. Sans parler du ciel de la grande salle qui lui faisait toujours si peur. Le monde des sorciers était horrible, bruyant, bizzare ! Londres lui manquait comme il ne lui avait jamais manqué. Elle ne faisait pas partie de ce monde là. Comment allait-elle faire pour s'adapter alors qu'elle se savait si bête et si maladroite ?

Cette fois ce fut la goutte d'eau qui fit déborder le vase. Après s'être faite réprimender par une grande de la maison verte...serpent quelque chose, elle avait éclaté en sanglots et avait couru droit devant elle sans vraiment regarder. Elle aurait pu atterrir n'importe ou. Le saule cogneur, la forêt interdite, le lac...le hasard voulut qu'elle trébuche sur la pelouse.

Elle n'eu pas le courage de se relever et resta, a quatre patte sur le sol, sans avoir conscience de son ridicule, et continua a pleurer. Elle s'était égratigné le genou (comme d'habitude), ses cheveux étaient décoiffés (comme d'habitude) et elle ne comprenait rien (non j'arrête sinon je vais me mettre à chanter !). Elle n'entendait pas les oiseaux chanter en cette fin d'automne, ni ne vit le soir tomber. Lorsqu'elle leva les yeux, il faisait noir. Elle n'avait pas sa baguette sur elle et des arbres lui cachaient le chateau. Elle était perdue.

Lucie perfectionnait sa connaissance de sa nouvelle demeure. C'est que la petite supportait difficilement l'idée de pouvoir se perdre en un quelconque moment, et plus vite elle connaîtrait parfaitement le château et se senvirons, moins il y aurait de risques. Alors, chantonnant doucement, elle errait, enregistrant avec application les moindres détails du paysage.
Ce faisant, elle repensait à sa première semaine ici. Ca n'avait pas été aussi redoutable que ce qu'elle avait d'abord craint. Les cours étaient à vrai dire plutôt simples, et les professeurs suffisamment compétents pour se faire comprendre. Autant dire que Lucie était plutôt enthousiaste après son entrée dans l'école de Sorcellerie. Le seul point noir était sans doute la présence de sa soeur dans la même Salle Commune qu'elle, qui s'était mis en tête de gérer ses devoirs. Et, comme Lucie avait toujours été bien plus organisée qu'Angela (il suffisait de voir l'état de la chambre qu'elle partageaient!), la situation était quelque peu conflictuelle. Mais Lucie nourrisait l'espoir qu'Angela serait très binetôt trop absorbée par ses propres devoirs pour s'occuper davantage de ceux de sa petite soeur.
Bref, la petite blondinette se promenait dans le Parc, laissant ses pensées errer au gré de ses pas lents, dans le soir qui tombait. Elle commençait à songer à rentre rau château, couvre-feu oblige, quand elle crut apercevoir quelque chose par terre qu'elle n'avait pas repéré à l'aller... Elle croyait pourtant avoir tout mémorisé, des chemins les plus variés jusqu'à la simple bûche traînant au sol. Curieuse, elle s'approcha de cette "chose" à terre. Une bûche, sans doute. Elle constata cependant que "ça" faisait du bruit... Ca pleurait... Une bûche qui pleure? Il fallait peut-être revoir son hypothèse. Apparemment, c'était un être humain. Une fille, même, au son de la voix qu'elle percevait, quoi qu'étouffée. Lucie hésita un instant... Devait-elle déranger cette fille qui pleurait? On était souvent mieux seul, dans ce genre de postures. Mais il faisait déjà nuit, et le couvre-feu allait bientôt tomber. Cette fille avait sans doute de bonnes raisons de pleurer, et elle s'attirerait encore davantage d'ennuis en ne rentrant pas. Et puis, on ne savait pas ce qui pouvait rôder dans le Parc, la nuit. On disait qu'il y avait des bêtes dangereuses dans la Forêt, peut-être en sortaient-elles dès qu'il faisait sombre pour s'approcher du château. Lucie frissonna. Non, elle ne pouvait laisser cette fille toute seule à pleurer.
C'est alors qu'elle leva les yeux vers Lucie. Elle semblait perdue. Celle-ci, s'apercevant qu'elle ne devait pas être très visible ni très rassurante, dans la nuit, sortit sa baguette. Elle avait déjà appris un sort qui lui semblait particulièrement utile: un sort qui permettait de faire d ela lumière. Elle leva le bout de bois qu'elle tenait dans la main et murmura la formule:

-Lumos.

Une minuscule lumière apparut au bout de la baguette, oscilla un instant, faillit disparaître, puis, renforcée, laissa appraître le visage de la fille qui se trouvait à terre. Elle ne semblait guère rassurée. Lucie lui sourit.

-Salut! Il faut rentrer, je pense... Il est tard...

Elle lui tendit la main pourl'aider à se relever.

-Au fait, je suis Lucie. Lucie Warren. Elève à Serdaigle, en première année.

Elle jeta un regard interrogateur à la fille, attendant qu'elle se présente à son tour.

La jeune fille qui était à terre la dévisagea un instant, signala qu'elle ne connaissait pas le chemin de retour. Lucie réfléchit un instant. certes, il faisait nuit, mais elle espérait se souvenir de la route suffisamment pour rentrer au chateau. Ce qu'elle dit de suite à la fille à l'uniforme jaune.

- Oh, tu sais, le parc du château ne semble pas si grand, je pense que nous arriverons à nous retrouver avant l'aube.

Elle ponctua sa remarque d'un sourire rassuré, afin de paraître certaine de connaître la route parfaitement. Ce faisant, elle commença à réfléchir au chemin qu'il faudrait prendre. C'est qu'elle doutait que tout ce qu'elle avait exploré fût bien ancré dans son cerveau. Elle s'aperçut alors que la jeune fille s'était relevée sans son aide, et s'apprêtait à retirer sa main quand son interlocutrice la lui serra avec une vigueur qui fit presque trébucher Lucie. Après tout, ça pouvait aussi servir à ça, une main tendue. Même si c'était un peu fort, quand même... La fille se présenta alors. Elle se nommait Ruth, et était bien chez les Poufsouffle. Lucie inclina de la tête comme on lui avait appris à le faire et dit avec un petit sourire.

-Enchantée de faire ta connaissance.

Elle s'apprêtait à se mettre en marche quand Ruth lui posa une question qui la laissa perplexe quelques instants.

*Suis-je anormale? Qu'est-ce que cette fille peut bien entendre par normale?*

Les seules personnes qui à son sens pouvaient être déterminées dans le monde des sorciers comme anormales étaient les enfants de moldus. Elle répondit avec prudence. Ne pas semer à tous vents les secrets de la famille, on ne sait jamais ce qui peut pousser ensuite.

-Hmm... Mon père n'est pas sorcier, si c'est ce que tu entends par "anormale"...

Elle la fixa d'un air intrigué, espérant bien que sa vis-à-vis développerait un peu sa conception de la normalité. Elle se reprit cependant. Il était tard, et sa curiosité ne devait pas prendre le pas sur la raison.

-Ceci dit, on devrait rentrer, je pense... Le couvre-feu va bientôt tomber, et ça serait dommage de perdre des points bêtement.

Elle jeta un coup d'oeil alentour, tâchant de se repérer. Elle savait par où elle était arrivée. Après, elle aviserait, et espérait bien trouve rla route rapidement. Visiblement, il ne fallait pas compter sur Ruth pour l'aider à trouver le chemin.