Pauvre, pauvre Sybille. Malheureuse femme plongée dans une affliction peu commune. Seule, calée dans son habituel fauteuil délabré, elle contemplait sans vraiment le voir son feu de cheminée ; aussi brûlant que son front. Les flammes dansantes l'hypnotisaient comme un envoûtement incandescent, agrippant ses rétines de leurs doigts malicieux. Son châle glissait sur ses épaules, renforçant cette image d'abattement soudain.
Elle était lasse, même si elle ne savait dire pourquoi. Les sarcasmes constants de plusieurs élèves, peut-être, la pénurie inattendue de Xérès, sans doute. La lumière tamisée de la pièce donnait un idée précise de son ressenti : quelque chose de sombre, de diffus, d'inconsistant. Impalpable, oui, elle l'était. Car au travers des mots et des gestes nébuleux se terrait une femme forte, sûre d'elle, inflexible dans ses idées. Et pourtant, poutant...
Pourtant aujourd'hui, elle doutait. Non pas de ses capacités - elle possédait le don de Cassandra, il n'y avait aucun doute là-dessus - mais plutôt de son impact. De sa crédibilité aussi. Car en fin de compte, comment pouvait-elle enseigner, transmettre à ses élèves un vécu et une force qui relève avant tout du cheminement personnel ? La Divination était avant tout une découverte au plus profond de soi-même, une recherche de réponses inconscientes. Parvenait-elle vraiment à guider ses apprentis sur ce chemin d'auto-accomplissement ? Elle avait commencé à se poser la question, et l'absence de réponses la rongeait de plus en plus. Dans un monde se détachant de plus en plus de l'imaginaire, la discipline de Sibylle avait bien du mal à conserver tous ses attraits. Et elle, à maintenir son moral.

La cloche du château retentit alors, projetant des notes graves à travers tout Poudlard. Déjà onze heures. A se morfondre sur des hypothèses bien infondées, elle s'était expulsée hors de tout concept temporel. Au dessus des minutes et des heures. En dehors de l'Angleterre.

Elle papillonna des yeux, chassa du doigt les poussières pressées contre ses lunettes. C'était à son tour. Bientôt afflueraient ses élèves, ceux qui croyaient encore aux empreintes du destin. Elle sourit à cette simple pensée, remonta ses bracelets de perles et arpenta la salle de classe, vide de tout être. Enseigner était en quelque sorte son exutoire, sa façon d'expier toutes ses remises en question honteuses. Elle, Sibylle Trelwaney, avait failli l'espace de quelques heures. Quel trahison envers l'avenir sombre qui se dressait devant elle. Cela ne devait plus se reproduire. Elle se passa une main sur le visage, comme pour balayer d'un geste une surface d'incertitudes, ouvrit la trappe aménagée dans le sol, et laissa tomber sa fine échelle d'argent. Elle venait d'ouvrir la porte à ses disciples, celle qui ne menait qu'aux vérités absolues.

- Montez, mes chéris, murmura-t-elle aux visages levés vers elle. Le cours va commencer.

Et une force nouvelle l'envahit, la rendant si différente, si forte. Elle était Sibylle Trelwaney à nouveau. Si seulement il restait un peu de Xérès...

Petit à petit, presque au compte goutte, des têtes apparurent par l’ouverture de la trappe. Toutes exécutaient le même mouvement : un regard circulaire qui se posait d’abord sur le professeur Trelawney, ensuite sur le feu ronflant dans la cheminée, pour enfin de stabiliser vers une place toute respective. Serpentards, Serdaigles, Gryffondors, Poufsouffles… La classe d’ASPIC de Sibylle mélangeait les quatre maisons, ce dont elle ne pouvait que s’enorgueillir ; car ils étaient nombreux à posséder le don de double vue.

Beaucoup s’étaient avérés être d’agréable surprises, comme Cennyd McAyr. Turbulent au départ, réticent quant à la matière, il avait fait preuve d’une lucidité étonnante au sein des brumes du destin, acquérant de plus en plus d’acuité au fil des ans.

* Je m’en doutais d’ailleurs assez bien, songea le professeur Trelawney avec gravité. Ce garçon a du potentiel.*

D’autres élèves continuaient à prendre place, tâtant l’ambiance de la classe, hésitant à installer près de la fenêtre, en quête d’un peu de fraîcheur. De-ci de-là, de nouvelles têtes émergeaient des habitués, dévisageant la médium d’un regard tantôt sceptique, tantôt impressionné. L’une d’elle, en particulier, fixait Sibylle avec une telle intensité que le professeur se précipita dans ses papiers, cherchant après le nom de cette curiosité. Jessicayumi Belmontet. Serdaigle.

* Possibilité d’être un bon élément, se dit Sibylle.*

Lorsqu’elle fut persuadée de se trouver face à l’entièreté de sa classe – moins les excusés – elle arpenta les rangées de tables, poufs et tabourets, cherchant dans les multiples prunelles un éclat particulier ; celui du voyant débordant de révélations. Mais seuls les affres de la fatigue animaient l’ensemble des pupilles d’une lumière terne, presque éteinte.

Le feu devait y être pour quelque chose, Sibylle en était consciente, mais elle se refusait tout simplement d’apaiser la chaleur.

* Le flux incandescent favorise les ondes *

Elle avait d’ailleurs un peu froid, en y réfléchissant bien. Redressant son châle sur ses épaules avec la posture d’une femme accablée par le malheur, elle s’adressa à son troupeau de fidèles.

- Bienvenue mes chéris… oui, soyez vraiment les bienvenus. J’espère que les sensations capiteuses de cette pièce animent d’ores et déjà votre Don, qu’elles le tiennent prêt à Voir et à Prévoir.

Elle hocha gravement la tête, appuyant presque chaque syllabe d’un trémolo profond.

- Vous l’aurez tous ressenti, une ombre s’étend sur Poudlard. De grands malheurs se sont enclenchés, et la Mort rôde par-dessus nos têtes. Terrifiante. Affamée. Prête à frapper !

Elle glissa discrètement une main dans sa poche.

- Mais cette succession d’évènements abominables, mes enfants, nous pouvons les déjouer. Les traduire au travers d’une succession de signes et d’indices, que le Destin appose sans cesse dans l’Univers, à la portée de notre troisième œil.

Et d’un geste brusque, catégorique, elle brandit devant elle une carte de Tarot, faisant sursauter les trois quart de la classe.

- La Cartomancie ! annonça-t-elle avec force. La plus inflexibles des techniques divinatoires. Et pour correctement vous immerger dans cette pratique nouvelle, je vais vous soumettre à une pratique immédiate.

Elle agita distraitement sa baguette magique par-dessus son épaule, et une mince craie blanche écirvit d'elle-même série de consignes au tableau noir.

- Voici la signification de chacune des cartes d'un éventail traditionnel de tarot, susurra-t-elle avec excitation. Je vous demanderez de prendre l'un des jeu mis à votre disposition juste là (elle désigna une grande bibliothèque pleine de paquets crasseux), de vous tirer votre propre destin, et d'analyser correctement les évènements qui risquent de survenir. Selon la qualité de vos interprétations, je vous donnerai une note en conséquence, et ce afin de vous préparer aux ASPICs.

Le tableau noir était maintenant couvert d'inscriptions diverses, et on pouvait y lire :

La poire dorée (à l'endroit) : le choléras
La poire dorée (à l'envers) : des conflits familiaux
La flûte tachée de sang : constipation ou découverte d'un petit chat abandonné
Le poële au bois (à l'endroit) : réussite scolaire
Le poële au bois (à l'envers) : incendies diverses
Le furoncle lumineux : risque de chute du haut d'une tour
Le bouton de manchette : possibilité de se retrouver nu
La dentition carriée (à l'endroit) : perte d'un membre (aussi bien du corps que de la famille)
La dentition carriée (à l'envers) : acquisition d'une nouvelle plume
La chaise angélique : pénurie de papier toilette
La fenêtre incandescente : cheveux blancs
Le concierge affable (à l'endroit) : nettoyage à sec de vos vêtements
Le concierge affable (à l'envers) : attention : verglas !
La sauterelle délicate : prudence face aux grand mâles
L'hymne national : incontinence.

Le professeur Trelawney claqua dans ses mains.

- La liste de consignes est très claires, mes petits chéris, dit-elle doucement. N'oubliez pas de bien battre votre jeu, et d'en tirer cinq lames. Pas une de plus, pas une de moins. Par la suite, je vous demanderai aussi de bien vouloir me rédiger une rédaction de dix lignes m'expliquant ce qui risque de vous arriver, ainsi que votre ressenti face à de tels présages. A me rendre avant la fin du cours. Bonne chance à tous !

Et elle se laissa aller dans son fauteuil, une main sur le coeur.

Cennyd n'aimait ni ne détestait les cours de divination du Professeur Trelawney. C'étaient des points facilement gagnés lorsqu'on avait comprit le principe et qu'on avait de l'imagination, aussi le prévoyant serpentard s'était bien gardé d'abandonner une matière si profitable. Il lui fallait les meilleures notes possible et s'il pouvait avoir une option sans travailler, il n'allait pas s'en priver.

Il monta rapidement les escaliers menant à la tour accompagné d'un de ses camarades qui avait suivit le même raisonnement que lui. Cennyd et Mark discutaient gaiement en entrant dans la salle et décidèrent de passer le cours a commenter la prof et les filles ensemble. Ils l'avaient fait durant toute l'année dernière et comptaient bien passer de bons moments de délire cette année aussi.

Inconscient de la déprime et des questions existentielles que se posaient leur professeur, les deux adolescent entrèrent dans la classe en riant franchement en se rappelant de la tête de Potter face au dragon l'année dernière lors du Tournois des Trois Sorcier. Ses 'accios' désespérés, et le balais qui ne venait pas, c'était tellement drôle quand on y pensait ! Et puis cela évitait d'avoir à se souvenir de la troisième épreuve, celle qui avait tué Diggory. Même Cennyd avait été choqué par cette mort au sein même de l'établissement. C'était probablement a cause de ça que cette année, les cauchemars ne se calmaient pas. Que l'on puisse mourir à l'intérieur même de Poudlard l'avait frappé d'une terreur peu commune. Si c'était le cas alors aucun lieu en Grande Bretagne n'était sauf et sa mère courait un grand danger !

Son rire mourut dans sa gorge et il frissonna. Mark lui jeta un regard étonné que Cennyd détourna en lançant une nouvelle vanne, sur Hagrid cette fois. Le géant et ses verracrasse ! Qu'allaient-ils apprendre cette fois ? A tailler des citrouilles pour Haloween ?

Les deux amis s'assirent autour d'une table, au milieu de la pièce et continuèrent leur conversation sans prêter la moindre attention à leur professeur. Tant que les autres n'étaient pas arrivés, elle ne pouvait pas leur dire grand chose, non ?

Les autres entrèrent petit à petit et l'ambiance devint studieuse. Même Ced consentit à se taire le temps de lire les instructions sur le tableau noir. Un grand sourire éclaira ses traits fatigués. Le Tarot ! Ouais ! Ca c'était encore mieux que les feuilles de thé ou la boule de cristal. Avant même de prendre les cartes il avait déjà quatre/cinq idées de ce qu'il pourrait écrire et Mark semblait en avoir au moins autant vu les coups dans les côtes qu'il venait de recevoir !

MAIS, ce n'était pas une raison pour faire le fayot, aussi Cennyd envoya son ami chercher son paquet pour lui et fit mine de se concentrer et de faire le vide en lui pour laisser s'ouvrir son troisième oeil. Il n'y croyait pas du tout et faisait plus de cinéma qu'autre chose mais Trewlaney ne savait pas faire la différence alors il n'allait pas s'en priver.

Mark lui lança le paquet alors que le professeur avait le dos tourné. L'adolescent voulu l'attraper mais le projectile rebondit sur le dos de sa main, atterissant en plein sur l'épaule d'un sixième année. Cennyd se leva, pestant contre Mark qui ne savait pas viser et alla récupérer SON paquet avec un sourire moqueur.

"Rend moi mon paquet le môme, et estime toi heureux que je n'envoie pas mon troisième oeil te hanter toute ta vie"

Il avait parlé à voix basse pour ne pas être entendu et avec son arrogance habituelle. Sans laisser à sa victime le temps de répondre, il retourna à sa place, vida le paquet en vrac sur la table et prit un air inspiré pour choisir 5 cartes au hasard. Puis, d'un coup de baguette il envoya toutes les autres dans le paquet et posa son 'futur' face cachée sur la table. Il esperait avoir des trucs bien horrible mais se savait assez d'imagination pour avoir une bonne note de toute façon. Il prit alors son parchemin et écrivit.

rédaction de Cennyd McAyr a écrit:

Je suis seul, devant ces cartes qui je le sais déjà, ne présagent rien de bon. Il y a comme quelque chose d'obscure qui se dégagent d'elles. Je tremble à la seule idée de les retourner. Autour de moi les autres élèves rient et je les envie, s'ils savaient seulement le triste destin qui nous attend...

Il posa sa plume et se relut rapidement, fier de lui. Voila un début qui allait plaire à Trelawney ! A lui l'Optimal ! Jetant un coup d'oeil autour de lui, il retourna la première carte et reprit sa description.

rédaction de Cennyd McAyr a écrit:

La première carte semble ridiculement gentille. La flûte tachée de sang, à l'endroit m'indique la perte d'un chat. Mais je sais que je ne dois pas la prendre au premier degrès.

*ne serait-ce que parce que je n'ai pas de chat* pensa goguenard le jeune serpentard avant de tourner la seconde en esperant quelque chose de plus grave.

rédaction de Cennyd McAyr a écrit:

Je retourna la deuxième lame, un peu plus confiant cette fois. Je n'aurais pas du. Le poëlle au bois à l'envers me rappelle à l'ordre. Un incendie ? Des incendies ? Mais ou ? Je maudits mon troisième oeil de ne pas pouvoir être plus explicite et me précipite sur la troisième lame en espérant plus de détails

Cennyd posa tranquillement sa plume et jeta un coup d'oeil sur la copie de son voisin. Mark avait déjà tiré la chaise angélique et l'hymne nationnal. Le pauvre ! Finalement il n'avait pas des cartes SI pourries que ça ! Il tira la troisième lame avec un calme en totale opposition avec ce qu'il décrivait sur son parchemin et envoya un coup de coude à son voisin, soudain hilare. Il avait eu sa préférée, la sautrelle délicate !

rédaction de Cennyd McAyr a écrit:

Mon coeur rate un battement tandis que le voile du futur s'affine devant mes yeux. La sautrelle délicate m'apprend à me méfier des grands mâles. L'incendie serait donc d'origine criminelle ? Non, ce serait trop simple. Je tremble à l'idée d'apprendre par la prochaine carte la mort d'un de mes camarades. Car je suis certain maintenant que le destin qui est écrit ici ne peut qu'être funeste.

Maintenant impatient de savoir de quel 'grand mâle' il devait se méfier, l'adolescent tourna rapidement la quatrième carte et se retint d'exploser de rire.Le bouton de manchette ! Trop drôle ! Sans prendre le temps d'écrire il retourna d'un geste vif la cinquième et se mordit la lèvre, plus hilare que jamais. La dentition carrée, à l'endroit. Soit si on en croyait le sage tableau du professeur, la perte d'un membre...au sens propre ou d'un membre de famille.

rédaction de Cennyd McAyr a écrit:

Le bouton de manchette et la dentition carrée à l'endroit me révèlent enfin le futur. Moi, grand mâle suis condamné à voir un membre de ma famille périr lors d'un incendie juste au moment ou il trouvait un petit chat. Cette découverte fera saigner mon coeur et mon âme sera mise à nu. Je tremble à cette seule idée mais je remercie le destin de m'avoir mis en garde car ainsi je vais peut-être pouvoir éviter ce désastre. J'écrirais dès ce soir aux miens pour leur demander de se méfier des chats. Au fond de mon coeur je garde encore l'espoir d'avoir mal interprêté les auspices mais je sais, comme on SAIT les choses, que le pire est à venir.

Il laissa tomber une tache d'encre sur la fin de sa rédaction qui fasse comme une larme et sortit un autre parchemin sur lequel il écrivit, goguenard et pas du tout effrayé (parce qu'au fond il n'y croyait pas du tout), sa vraie interprétation. Beaucoup plus drôle celle là !

Spoiler:

Un grand éclat de rire s'échappa de la gorge de Mark et rompit le silence studieux de la salle. Quelques élèves se retournèrent pour leur intimer de se taire mais Ced (qui avait, rappelons le, terminé son devoir) leur fit une grimace avant de reprendre son serieux et d'aller, d'un air calme et pompeux, porter sa rédaction à son professeur, laissant sa vraie prédiction sur la table afin que tous puissent la lire. Une prédiction pareille, ça se partageait ! Et puis qui sait, peut-être que le petit chat abandonné se ferait connaître !

Pour Théo Garner, se rendre aux cours de divination était une véritable perte de temps. Les années précédentes lui avaient montré qu’il ne possédait pas - et ne posséderait certainement jamais – ce qu’on appelait le troisième œil. Mais malgré cette triste constatation, il continuait à se rendre chaque semaine dans cette tour étouffante pour écouter les délires d’une vieille folle. Vieille folle ? Non non ce terme n’était pas abusif, la Trelawney étant tout bonnement incapable de leur prédire quoi que ce soit de tangible quant à leur éventuelle destinée.
Son seul don était de savoir se mettre en spectacle. Ajoutez à ceci son goût prononcé pour les événements tragiques et le scepticisme de la plupart des élèves pour vous faire une idée d’un cours typique de divination.

Avec un manque d’enthousiasme à peine dissimulé, le rouge et or entra dans la salle de divination et se laissa tomber sur l’un des poufs du fond. Pas de doute, les heures qui allaient suivre promettaient d’être riches en divertissement. Lorsque tous les élèves furent arrivés, le professeur Trelawney brisa les quelques murmures de sa voix grave et mystérieuse :

- Bienvenue mes chéris… oui, soyez vraiment les bienvenus. J’espère que les sensations capiteuses de cette pièce animent d’ores et déjà votre Don, qu’elles le tiennent prêt à Voir et à Prévoir.

* La seule chose que cette pièce anime chez moi c’est mon envie de dormir *

Se redressant légèrement, Théo fit mine d’être absorbé par les paroles de son professeur tandis que ses pensées se tournaient vers des choses bien plus importantes. Ce n’est que lorsqu’elle prononça le mot tarot qu’il releva la tête pour lire les inscriptions qui venaient d’apparaître sur le grand tableau noir de la classe. Se mordant méchamment les lèvres pour ne pas éclater de rire face aux significations des cartes, le rouge et or toussota discrètement et jeta un coup d’œil à la ronde. Beaucoup d’élèves semblaient tous aussi amusés que lui. Les autres restaient immobiles, immobiles et respectueux. Désireux d’en finir au plus vite, Théo se servit de l’un des paquets de cartes, étala les cartes sur toute la surface de la table et les mélangea grossièrement. Qu’il se concentre ou non sur le tirage des lames ça ne changerait rien, il allait tout inventer.

* Voyons, un petit cochon pendu au plafond…*

Les cinq lames sorties, le garçon réprima un nouveau fou rire. C’était son jour de chance apparemment : furoncle lumineux, poire dorée et dentition cariée à l’envers, poêle au bois à l’endroit, et chaise angélique. Les cartes idéales pour faire du bon papier, du très bon papier.
Inspiré, Théo s’empara de sa plume et se mit à écrire tout ce qui lui passait pas la tête :

Citation :

La mort est tout autour de nous, autour de moi. Des événements sombres planent au-dessus de ma pauvre personne. Je ne peux plus faire marche arrière. Je me dois d’être à l’écoute totale de mon troisième œil, aussi terribles soient les événements à venir. Les signes ne trompent pas, mon premier tirage m’annonce déjà l’ampleur de ma triste destinée. Le furoncle lumineux m’informe en effet que je risque une morte brutale et inattendue comme la chute du haut d’une tour. Cette nouvelle m’afflige mais je réussi malgré moi à me saisir de deux autres cartes. La poire dorée à l’envers me signale de probables tensions avec un membre de ma famille. Mes proches seront donc mêlés à mon malheur.
Ces conflits pourraient même amener une rupture nette si j’en crois la symbolique dentition cariée à l’envers.

Peu préparé face à ces terrible nouvelles, c’est à contrecœur que je ramasse les deux dernières lames. La première, le poêle au bois à l’endroit, m’apporte du réconfort quoique bien maigre. D’après la carte, mes résultats scolaires devraient s’améliorer considérablement. Il se pourrait même que j’obtienne une note maximale en divination. Difficile à admettre mais mon troisième œil est mon meilleur ami, je ne peux l’oublier.
Enfin mon dernier tirage, la chaise angélique, m’indique que le papier toilette risque de faire défaut dans les prochains jours. Au moins je sais maintenant que je dois prévoir plus de paquets de mouchoirs pour ne pas user dans les réserves de papier toilette. Je suis un garçon si émotif…

Satisfait, Théo ne prit pas la peine de se relire et alla porter le parchemin au professeur qui le scruta avidement, espérant sans doute lire chez lui un quelconque signe de détresse. Heureusement que les devoirs n’étaient pas lus à haute voix pensa le rouge et or en retournant s'asseoir sur son pouf…

Majandra détestait les cours de divination. Elle détestait sa coéquipière. Léna Smith était une nunuche, une nunuche de serpentarde qui passait le cours à lui parler d'une manière selon elle correcte pour se maquiller. En fait, ça faisait ça:

Oh, ma grande, regarde les joues que tu as. Elles seraient sublimes si elles étaient pas aussi blanches. Alors voilà ce que tu devrais faire.

Et Patati et patata. Majandra avait écouté ces propos avec une demi-attention, préférant mobiliser son intelligence pour autre chose de moins superficiel que la conversation de sa voisine de table. Majandra, excédée, avait fini par prendre sa baguette magique et de lui jeter un "silencio" discret. Ah, enfin, elle allait pouvoir écouter tranquillement le cours.

Elle ignora délibérément sa voisine qui faisait des grands gestes indignés. Majandra afficha un rictus sarcastique. Elle était là, buvant les paroles de Sibylle comme si c'était digne d'un quelconque intérêt. Elle entendit un éclat de rire plus loin. Son sang se glaça. Mc Ayr! Dans ce cours! Majandra tourna la tête, et vit une tête rousse qu'elle abhorrait par dessus tout. Dégoûtée, elle détourna le regard. Tiens, elle préférait encore les babillages de Léna, plutôt que ses conneries à lui. Majandra appuya sa tête sur sa main, aprés avoir vérifié que son chignon était toujours en place.

Majandra ne laissait jamais ses cheveux libres, elle était toujours affabulée d'un chignon serré, strict d'où aucun cheveu ne dépassait. Ca lui donnait certes un air austère, mais son visage était dégagé, et aucun cheveu ne pouvait se glisser devant ses yeux alors qu'elle était en train de faire un travail crucial. Trelawney avait décidé de faire...du tarot. Quoi? C'était quoi ce bazar? Majandra se pinça l'avant bras, pour s'assurer qu'elle ne rêvait pas. Elle grimaça quand elle tordit accidentellement ses brûlures de cigarette et ses lésions diverses. Eh non. Si certains se cachaient, Majandra, elle, gardait ses bras à l'air libre. Tiens, pour un peu, elle aurait rigolé de l'air ahuri d'un gars qui avait vu "sang pur" gravé dans sa chair, au niveau de son décolleté. Amusée, Majandra regarda Trelawney écrire quelques trucs au tableau, aprés avoir débiter un discours sinistre sur la mort. Majandra fut prise d'un petit rire.

Oui, je vois que Mc Ayr va prochainement mourir dans d'atroces souffrances.

Elle l'avait juré. Et Majandra était du genre à tenir ce genre de promesses. Mais...Oups. Elle ne s'était pas aperçue qu'elle avait parlé à voix haute. On la prenait déja pour une cinglée, on la prendrait maintenant pour une psychopathe. La Serpentarde sourit quand sa conscience se la ramena.

*Bravo, maintenant tu as la réputation d'une psychopathe. Haha. Merci de me le rappeler, tu es adorable.*

Sacrée conscience. Majandra essaya de déchiffrer l'écriture sibyllienne de son prof. Sibylienne, Sibylle, ha ha, Majandra, quel jeu de mot. Majandra fut secouée encore une fois d'un petit rire.Majandra prit le paquet de cartes. Elle tira cinq cartes au hasard. Elle faillit exploser de rire quand elle vit ce qu'elle avait tiré. Elle prit sa plume, un morceau de parchemin, puis elle se mit à écrire, de sa plume débordant de cynisme.

Majandra Collins a écrit:

J'ai enfin trouvé un jeu de cartes encore plus amusant que le huit américain. Le tarot. Le huit américain était déja un jeu trés excitant, où le suspense tenait une place prépondérante et où les châtiments étaient de rigueur. Au Tarot, non seulement on t'annonce les châtiments que tu encours, mais en plus, si tu y crois, tu as toutes les chances de les subir. Et là, tu as intérêt à sortir blindé; vous allez lire ce qui va suivre, et vous tremblerez.

super accroche. Digne d'un prix Pullitzer. Digne d'un des romans à suspense d'Agatha Christie. Majandra pouffa de rire, qu'elle étouffa dans une quinte de toux. Ca aurait pu être crédible si elle n'avait l'air aussi hilare. Elle retourna la première carte. La flûte ensanglantée.

Héhé! Conspiration ou découverte d'un chat abandonné. Hum...Eurêka!

Elle avait crié Eurêka assez fort, si bien que le tartempion le plus devant ou le plus derrière avait sans doute dû l'entendre. Majandra prit sa plume, et, fébrile, elle écrivit.

Majandra Collins a écrit:

La première lame est une bénédiction. Elle a une signification un peu ambigue, comme moi j'ai un caractère ambigu. Dans un premier temps, on annoncerait une trouvaille de choix: un petit chat abandonné. Je doute fortement que les chats abandonnés courent le château, mais ne sait t'on jamais. Pourquoi ne pas avoir de compagnon pour Despair? Le pauvre, il s'ennuierait tout seul. Mais, l'hypothèse la plus plausible, dans mon cas, ça serait la conspiration. Héhé. Conspirer contre son pire ennemi, n'est ce pas merveilleux? Voilà de quoi méditer ce soir.

Majandra jeta un regard en coin à Mc Ayr. La carte avait t'elle visé juste? Qu'elle était à ce moment même en train de mijoter un plan diabolique pour se débarrasser de Mc Ayr? Majandra afficha un large sourire, puis elle regarda sa deuxième carte.

Majandra Collins a écrit:

Au deuxième tirage, aucun n'a trouvé les six bons numéros, mais moi j'ai pioché une autre carte. Le bouton de manchette. J'ai donc gagné le gros lot. Ca annonce une relation plutôt torride, non? A ce qu'il paraît, le bouton de manchette indique l'éventualité de se retrouver nu...Alors que signifie cette seconde lame, mitigée à la première? Je préfère ne pas y penser pour l'instant, et me concentrer sur la troisième lame.

Le but du jeu, c'était d'assembler les interprétations des différentes cartes afin d'en faire une, plus globale, nah? Dans ces cas là, Majandra afficha un air dégoûté. Si elle préparait effectivement une conspiration, et que sa deuxième carte lui indiquait une possibilité de se retrouver nue, ça voudrait dire que...Beurk. Mieux ne valait mieux pas y penser. pour son pire ennemi? Et puis quoi encore?

Sa troisième carte était le concierge affable, à l'envers. Ce qui signifiait qu'il allait y avoir du verglas. Majandra afficha encore un rictus;, puis elle écrivit la suite de sa rédaction, toujours avec son cynisme habituel.

Majandra Collins a écrit:

Aprés le tirage du loto, voici la météo. Nous annonçons du verglas sur la partie sud de la Grande Bretagne. Sortez donc les chaussures cloutées et préparez vos balais à résister au grand froid. Mes amis, le jour d'Aprés est arrivé. Vous gèlerez instantanément sur place. A moins que ladite carte n'annonce pas le temps de demain (quoique pour la majorité des élèves, en cours de divination, ils prédisent du brouillard) mais est-ce la confirmation des deux autres cartes? Alors si on m'avait dit que la victime de ma conspiration serait à profiter du spectacle, et que cela s'annonçait glacial, je l'aurais pris pour un débile mental. Mais j'espère que la quatrième et la cinquième carte seront plus précises.

Majandra regarda la quatrième lame. Le furoncle lumineux. Majandra s'écria d'un coup

Youpi!

Elle prit sa plume et écrivit la suite de ses interprétations

Majandra Collins a écrit:

A en croire la quatrième lame, une chute en haut d'une tour serait à prévoir. Ma nature dangereuse confirmerait l'hypothèse mise par les trois premières cartes. Alors si on résume, je pousserai mon pire ennemi du haut d'une tour, aprés m'être retrouvée nue sous ses yeux, et ce un jour de neige. Mais où va le monde? Je crains que la dernière carte va définitivement trahir l'esprit pervers qu'est le mien.

Hein? C'était quoi ce bazar? La poire dorée? A l'envers? C'était tout bonnement génial. La serpentarde commença à rédiger la dernière partie de sa rédaction. Restait plus qu'à inclure deux ou trois remarques moqueuses et le tour serait joué.

Majandra Collins a écrit:

Je crains que le Choléra m'oblige à rester au lit pendant une semaine voire plus. Vous savez, un peu de plus et on pourrait refaire les dix Plaies d'Egypte. Mais si vous ne me voyez pas en cours, c'est tout bonnement au delà de toute responsabilité de ma part. A en croire les cartes, je vais bien m'amuser, et ça me réjouit. Qui n'aime pas faire le mal? Ben quoi? C'est amusant, non?

Majandra afficha un air satisfait quans elle écrivit le dernier point de sa dissertation. Cynique à souhait. Reflet total de sa personnalité. Si Trelawney n'était pas contente, avec ça...

Mes pauvres chéris ; mes braves enfants ! Si jeunes, et déjà voués à disparaître ! Je dois vous confesser que j'ai étudié moi-même vos destins, et que les mêmes présages funestes se sont abattus sur mon coeur. Vous me voyez navrée d'être l'oiseau d'une si mauvaise augure.

Néanmoins; je tenais à vous féliciter pour le courage, l'héroïsme et le sang-froid dont vous faites preuve face à autant d'aversité future. Voici venue l'heure de vos résultats...

Ont obtenu :

McAyr, Cennyd : Optimal et cinquante points pour Serpentard.
Quel stoïcisme, quelle émotions dans vos propos ! Puisse vos souffrances ne pas durer trop longtemps. Je remuerai les dés du destin pour vous.

Garner, Théo : Effort Exceptionnel et quarante points pour Gryffondor.
La tentation de vous dédier un "O" fut longue, croyez-le... Hélas, j'ai cru déceler une certaine pointe d'ironie dans vos derniers propos. Sûrement une erreur d'interprétation ! Laisser aller vos sentiments horrifiés la prochaine fois.

Collins, Majandra : Optimal et cinquante points pour Serpentard.
Les dix plaies d'Egypte ! C'est tout à fait cela ma petite chérie ! Comme je vous plains, pauvre enfant... Puissiez-vous nous quitter une bonne note dans le coeur.