La rentrée scolaire était désormais passée. Tony avait retrouvé ses camarades et aussi fou cela puisse-t-il paraitre, il avait l'impression que tout était comme avant et rien ne changeait. Bien sûr, il fallait faire abstraction de la mort de Dumbledore... de l'absence de Potter, Granger et Weasley, du fait que Rogue soit officiellement Directeur et pire : que la DFCM ait été supprimée au profit d'une nouvelle matière très obscure. Et bien évidemment, il fallait aussi oublier la création de la maison Nunanbouc et la présence des Mangemorts. L'école de sorcellerie n'avait plus rien à voir avec l'an passé. Mais de se retrouver dans ces murs, pour sa dernière année de scolarité et de cotoyer à nouveaux les copains, ça effaçait presque tout. Garner voulait croire que, l'espace de quelques instants, il pouvait demeurer dans l'insouciance. Son esprit s'évadait, il décompressait et cela devenait salutaire. Avec le décès de son père, Tony se montrait moins enclin à sourire, ou à blaguer. Ce choc émotionnel l'avait conduit à être plus mature. Il le savait, son enfance, son innocence étaient désormais brisées. Plus rien ne serait comme avant. Dans les moments dramatiques, où le doute et des sentiments obscurs tentaient de prendre le dessus, les amis restaient un remède efficace. Ils lui donnaient la force de continuer, de ne surtout pas sombrer. Pour tous ces bons moments, il relevait la tête, refusant de céder aux tenèbres.
Oui, enfin, au sens figuré... parce qu'au sens propre, il marchait à vive allure dans les couloirs, la tête baissée. A vrai dire, il réfléchissait ardemment à son nouveau mauvais coup. Où allait-il le faire ? Et quand ? Il fourra sa main dans sa poche pour en effleurer le contenu. Il ne savait pas ce que ça valait, ces sangsues purulentes. Dans leur emballage, elles avaient déjà l'air immondes. Et d'après la notice, une fois à l'oeuvre, le résultat n'était pas beau à voir ! Pour que Garner ait été dégouté par l'illustration, c'est bien qu'elles comportaient un côté très crade ! Consacré à sa réflexion, il continuait d'avancer, d'un bon pas. Il avait grandi et désormais, ses enjambées devenaient plus grandes. Malgré sa stature de jeune adulte, il fit un léger recul lorsqu'il prit une autre élève de plein fouet. Sur le coup, il parut surpris, mais lorsqu'il posa les yeux sur elle, il se rendit compte qu'elle avait du se faire sacrément mal ! Garner s'agenouilla aussitôt pour lui mettre une main sur l'épaule. Lorsqu'il s'exprima, c'était avec sa voix grave, mais encore éraillée par la mûe de l'adolescence :
- Ce n'est rien, je ne t'avais pas vu non plus ! Ca va, rien de cassé ?
Soucieux de sa réponse, Tony l'aida à rassembler ses affaires. C'était étrange de voir deux générations côte à côte. Garner avait connu des premières années à Poudlard assez sympa. Hormis la chambre des secrets et le feu Professeur Quirell, à cette époque, il n'y avait aucun danger à l'horizon. Le Seigneur des Ténèbres appartenait encore au passé, à la légende. La jeune fille qu'il avait fait tomber, n'avait connu que le chaos. Elle le regarda et Tony croisa ses prunelles encore marquées par l'enfance. Elle lui rappela ses jeunes soeurs. Quel drame qu'elle ne connaisse que cette sale période. Poudlard était tellement plus beau que l'image qu'elle percevait aujourd'hui ! Le jeune homme n'était pas très mûr, pour le moment, mais il perçut dans ses yeux, une appréhension certaine. En dépit de son calme de façade, elle semblait angoissée. Le Gryffondor se demanda s'il avait un furoncle sur le nez. Il sourit et il allait lui faire la blague avant que Peeves ne déboule dans le couloir, dans un bruit fracassant, en hurlant : "Mangemort !!! Mangemort à bord ! Hahaha !". Outre la crise cardiaque qu'il manqua leur coller, Tony se redressa, soudain à l'affût. D'instinct, il avait sorti sa baguette. En scrutant autour d'eux, il ajouta :
- Viens... ne restons pas ici...
Protecteur, il se mit en bouclier et la guida jusqu'à une alcôve dans la pénombre. Deux silhouettes vêtues de noir ne tardèrent pas à se montrer. Elles avançaient en silence dans le couloir. Il détestait ces patrouilles... Instinctivement, il posa une main rassurante dans le dos d'Aurore. Le duo infernal poursuivit sa route. Tout en restant dans la pénombre, Tony glissa :
- Saloperies de Mange... euh... je veux dire... fichus mangemorts... mieux valait sa cacher, au cas où...
A dire vrai, il n'avait pas la conscience tranquille, parce que si jamais on le fouillait, il était cuit ! Et il y avait fort à parier que la personne l'accompagnant le serait aussi. Or, la poufsouffle n'avait pas mérité une telle injustice.
- Je m'appelle Tony Garner. Et toi ? Tu es à Poufsouffle, pas vrai ? Je crois que tu t'es trompée de route, non ? La salle de Poufsouffle est de l'autre côté du château...